samedi 27 décembre 2014

La famille Bélier

Titre

La famille Bélier.

Scénaristes


Stanislas Carre de Malberg, Victoria Bedos, Eric Lartigau, Thomas Bidegain.

Commentaire

Les Choristes sont dans le pré, en plus téléphoné.

1) Points forts
Excellent point de départ que de placer le conflit entre une famille de sourds-muets et une fille qui révèle un don pour le chant. Conflits en perspective !
On apprécie également l'immersion dans les univers paysans, ados, sourds, enseignants, sans tabous. François Damien purge le cul d'une vache ou accompagne un vêlage et n'en demeure pas moins un excellent amant pour la femme qu'il aime. Eric Elmosnino joue un prof de chant réaliste et pragmatique qui n'hésite pas à ridiculiser les mauvais élèves, mais s'engage envers ceux qui en valent la peine.
Les seconds rôles sont tous bien nourris, et on sent l'inspiration d'un film comme les arnachoeurs pour lequel le couple Férier/Damien tenait la barque. Il est ici incarné par Viard/Damien. On aimerait même que l'histoire se recentre sur eux, tant leurs enjeux peuvent parfois dépasser ceux du personnage principal.
Les quiproquos et l'humour parviennent à tenir le récit malgré ses quelques faiblesses organiques.

2) Points faibles
La comédie musicale use et abuse de chansons françaises libres de droits d'interprétations (+ de 25 ans d'âge) et se concentre sur un seul et unique répertoire, celui de Michel Sardou. Cela renforce le côté téléphoné du récit, qui, mécaniquement, lasse le spectateur. Par ailleurs, les chansons ne font pas structurellement progresser le récit, à l'exception de la reprise finale. Et l'attente se fait double.
Si, à cela, vous ajoutez que les interprètes ne nous surprennent vocalement pas plus que ce que nous avons entendu maintes fois dans de nombreux radio-crochets télévisés, on peut être très déçu du résultat.

3) Le même scénario, réécrit
En diversifiant les chansons, et en sélectionnant des oeuvres qui nourrissent la progression dramatique sans répéter les dialogues, nous gagnerions en efficacité. L'enjeu de l'héroïne Paula (Louane Emera) pourrait également être renforcé en montrant en quoi réussir un concours de chant, alors qu'elle n'en a semble-t-il que faire, peut devenir décisif. Par exemple, le fait qu'elle rencontre l'amour semble trop acquis avant l'ultime représentation et aurait pu en être la seule conséquence. Le fait que Paula parvienne à s'affirmer et à émouvoir son public de professionnels aurait alors suffit à aider Gabriel à changer sa manière de la percevoir.
Mais, les histoires secondaires aussi auraient gagné à être plus intimement liées à celle de Paula. Si leur déroulement reste effectivement subordonné à la disponibilité de Paula, occupée à apprendre le chant tout au long du récit, le succès de chaque seconde intrigue (élection du père-maire, amours de son frère envers sa confidente), jetées en deus ex-machina dans le générique de fin, auraient gagné à devenir possibles uniquement sur le succès de Paula. Par exemple, elle aurait pu affirmer à haute voix devant un public ébahi que chacun doit assumer ce pourquoi il est destiné, et que c'est pour cela qu'elle a pu se réaliser elle, et qu'alors, les autres aussi seraient bien inspirés de la suivre, en se réalisant chacun à leur tour, et paraphraser son prof de chant (l'adjuvant) pour qui chacun est responsable de son destin.
Mais cette comédie reste cela dit un agréable moment si l'on accepte de la prendre avec légèreté et avec la nostalgie ambiante d'une France mélancolique, jusque dans les plus belles traditions déchues de nos contrées les plus profondes (un paysan heureux qui gagne simplement sa vie, un prof inspiré entouré d'élèves consensuels, des adolescences édulcorées aux revendications légères).

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